En ce lundi 13 septembre, après avoir passé plusieurs jours à contourner l’enclave Russe de Kaliningrad, nous y sommes, la Lituanie devient enfin accessible ! Nous sommes à Wisztyniec. Une étrange pierre se trouve en face de nous. Elle marque le point où les frontières Russe, Polonaise et Lituanienne se rejoingnent.
C’est plutôt ridicule mais il est totalement interdit de faire le tour de ce monument phallique ! La barrière blanche et rouge indique d’ailleurs la frontière russe. Avec Mathilde nous nous approchons de la barrière blanche et rouge et mettons nos mains dessus pour contempler les grillages Russes à gauche et Lituaniens à droite. Une sorte de grésillement semble soudain sortir du porte voix situé à droite de la photo (aucune idée si le grésillement reflète un mécontentement transfrontalier !). On se recule légèrement.
D’ici, la Lituanie, bien qu’elle fasse partie de l’Europe et de l’espace Schengen, nous semble clairement inaccessible ! La frontière Russie / Lituanie est donc bien matérialisée par des grillages s’étendant à perte de vue. Par contre, on ne le voit pas sur la photo, mais à gauche (coté Pologne/Russie) les barbelés s’arrêtent, et la frontière Russe/Pologne n’est matérialisée que par une forêt dense coté Russe.
Comment se fait-il donc que la frontière Espace Schengen/Russie diffère donc selon si nous sommes en Pologne ou en Lituanie ?
Frappé de curiosité je me prend à vouloir longer la frontière Polonaise-Russe sur une centaine de mètres pour voir si je ne voix pas un grillage. Un petit chemin longe, coté polonais et me mène devant un motard aux bottes militaires…..
« dzień dobry » (bonjour) lancais-je au garde en face de moi.
« What are you looking for ? »
« I’m just curious, the border is on my right, isn’t it ? »
« Yes here you are in Poland. But you can’t go further as this path is reserved to guards. »
« Ah ok. then i won’t go further for sure. I was trying to understand why there were no barbels here compared with the Lituanian/Russian border ? »
« Lituanian/Russian border like this is recent. 2 years ago, there were no barbels, like here. Here, between Poland/Russia we don’t need them for now. But we have electronics you know. »
« So it’s like countries agreements ? »
« Yes »
Le téléphone du garde sonne, il répond et je peux entendre le garde répondre « tak », « tak » (oui… oui).
« My boss just called me, i need to take your identity, any ID ? We are curious about the people following the border »
Je suis un peu incrédule, après tout je suis en Pologne et donc toujours dans l’espace Schengen.
« Yes, i have some document at the bike behind me »
Je me redirige donc vers le vélo et le garde me rejoint d’un coup de moto. Il appelle donc son boss et communique le contenu de ma carte d’identité par téléphone en utilisant l’Alphabet phonétique de l’OTAN.(https://fr.wikipedia.org/wiki/Alphabet_phon%C3%A9tique_de_l%27OTAN)
Bref, le garde me rend ma carte. J’ai gagné un contrôle d’identité (plutôt sensible cette frontière semble-t’il…). Il répond par la suite aux questions des autres passants curieux qui saisissent l’opportunité de la présence du garde pour le bombarder de questions (sans leur prendre leur carte, eux !) Mon nom doit être dans un rapport militaire quelque part…
Mathilde est énervée, nous repartons à vélo pour trouver un passage nous permettant de passer en Lituanie ! (il y a une route traversant la frontière Pologne/Lituanie à quelques kilomètres).
Les jours sont beaux, le soleil nous chauffe doucement, et illumine le beau tableau qui s’offre à nous, avec l’automne qui arrive doucement, et commence à parer les arbres de magnifiques couleurs !
Nous nous arrêtons près de Ketrzyn pour passer la nuit, nous sommes au bord d’un lac avec de superbes infrastructures de détente : des abris avec tables de pique nique, des fauteuils, des balancelles, des toilettes, des douches (froides ^^)… Bref, de quoi passer une bien bonne soirée ! Par contre, il y est interdit de camper, mais qu’à cela ne tienne, nous nous installons juste à côté de l’entrée sur une zone enherbée où sont déjà posés deux vans : nous les rejoignons pour passer la nuit.
Le lendemain matin, nous roulons en direction de la tanière du loup (Wolffschanze). Qu’est-ce que c’est que ça ? Le nom de code des quartiers généraux d’Hitler pendant la seconde guerre mondiale. Malgré le dynamitage effectué par les allemands eux-mêmes à la fin de la guerre, et le temps qui a passé, les monstres de béton (des bunkers avec des toits de 5 m d’épaisseur !) restent bien en place dans la forêt. C’est à la fois impressionnant et lugubre.
Notre route nous mène ensuite au travers des beaux lacs de la Mazurie.
Puis, il nous faut comme toujours chercher un endroit où dormir. Nous avions repéré un agroturystyka (le même label que celui d’Henryk), mais à notre arrivée, il semble n’y avoir personne ! Pas plus de réponse au téléphone, alors nous devons continuer ! Un peu plus loin, nous tombons sur un panneau qui indique un terrain où on peut camper, chez l’habitant. Mais cette fois, ils n’ont pas de douche, et nous on aurait bien besoin de se décrasser un coup, donc nous poursuivons encore !
On finit par demander à des gens dans leur jardin au bord d’un lac, s’ils ne savent pas où on pourrait aller. Et miracle, ils nous proposent de planter la tente dans leur jardin, et d’utiliser leur douche ! Quelle chance nous avons finalement ! L’une des femmes nous amène même une bonne saucisse du barbec et du pain, trop sympa. Nous sommes par contre un peu étonnés qu’ils ne viennent pas nous parler de la soirée, à part cette femme qui nous a posé 2-3 questions. Pas de souci, nous sommes très bien installés, et comme il fait nuit tôt, nous nous couchons à 20h30 (on bat des records !).
Pas trop mal la vue depuis le jardin !!!
Les jours suivants, nous poursuivons notre route. Nous avons vu que la température allait chuter assez vite dans les prochains jours, alors nous traçons, au travers des chemins de terre et autres routes.
Il y a des calvaires enrubannés partout dans les villages
Par deux fois, nous tombons sur d’énormes belvédères qui semblent tout neufs, depuis lesquels nous dominons les vallées alentour. Assez surprenant de voir ces grosses infrastructures au milieu de nulle part !
Nous arrivons au point où les frontières de la Pologne, la Lituanie et la Russie se rencontrent (cf. cet article de Mathieu !).
Il n’y a aucune route qui part de ce point et se poursuit en Lituanie, alors nous devons continuer un peu notre chemin et passer encore une dernière nuit en Pologne. Depuis 2-3 jours, nous sommes assez déroutés par la froideur des gens qui nous hébergent ! Pas de sourire, pas d’intérêt manifeste à notre voyage… Ca nous met parfois mal à l’aise, mais c’est vraisemblablement une différence culturelle.
Finalement, nous avalons les derniers kilomètres qui nous séparent de la frontière. Alors que nous étions sur un chemin de terre, nous passons sur une route goudronnée à l’endroit même où se trouve le panneau de la Lituanie ! Ca nous fait bien rire mais au final, c’est probablement juste pour faire semblant car très peu de temps après cette même route redevient un chemin de terre, et le restera sur la quasi-totalité de notre parcours du jour (beaux dérapages en vue dans les chemins sableux !). Toujours est-il que c’est assez rigolo ! Nous remarquons aussi que du côté de l’entrée en Pologne, il n’y a pas de drapeau européen.
Nous traversons notre premier fuseau horaire et gagnons donc une heure, ce qui nous est fort agréable car la nuit commençait à tomber vraiment tôt.
Peu après, nous tombons sur un grillage barbelé ainsi qu’un portail, et nous restons dubitatifs : s’agit-il d’un vestige de l’ancienne frontière ou d’une nouvelle ? Difficile de savoir, surtout qu’il y a un panneau d’information juste à côté qui évoque des subventions de l’état pour construire de nouvelles infrastructures dont un terrain de basket à l’école voisine, et une frontière. Bref nous sommes perplexes !
Aujourd’hui, les routes qu’on emprunte sont vraiment bien aménagées, voire même neuves ! On avait l’impression que l’une d’entre elles sentait presque encore le bitume frais (et on a d’ailleurs croisé les ouvriers chargés d’ensemencer ses abords, comme quoi !). Du coup, une bonne journée remplie de kilomètres, et nous voici arrivés à Malbork, où nous dénichons un camping parfait pour passer la soirée.
Nous visitons la forteresse teutonique de Malbork (Marienburg), construite aux 13e et 14e siècles. C’est ici que le Grand Maître de l’ordre teutonique a fixé son siège en 1309. Cette forteresse est constituée de trois niveaux, avec l’avant château (pour les activités économiques), le château moyen, siège des activités séculières et des échanges avec l’extérieur, abritant notamment les appartements du Grand Maître, et le château haut abritant le monastère, entièrement réservé aux membres de l’ordre.
L’ordre des chevaliers teutoniques, ou plutôt, l’ordre des chevaliers de l’hôpital de Sainte Marie des allemands, a été créé vers 1127-8 en terre sainte pour venir en aide aux pèlerins germaniques malades ou blessés. Peu à peu, l’ordre se militarise, jusqu’à s’imposer comme ordre religieux et militaire, placé sous la seule autorité du pape.
En 1229, et alors que la période des croisades est sur le déclin, ces moines soldats répondent à l’appel de Conrad de Mazovie pour préserver ses terres d’une invasion des prussiens (comprendre pour anéantir et convertir les prussiens païens). Au passage, ils en profitent également pour s’approprier les terres prussiennes, et créent un état théocratique au bord de la Baltique, qui s’étend jusqu’à l’Estonie.
Ils établissent alors leur capitale à Malbork et commencent la construction de la château-monastère de Marienburg (autre nom de la forteresse de Malbork). En parallèle, 120 autres châteaux, également en briques, ont été construits sur leur territoire. Ils sont assez fortunés grâce au commerce de l’ambre, mais aussi grâce à leurs activités agricoles, leurs nombreuses manufactures…
Dans leur soif d’agrandir encore plus leur territoire, ils tentent de combattre les polonais, mais l’opération se solde par un échec lors de la bataille de Grunwald en 1410 : ils sont vaincus par le royaume de Pologne qui s’était unifié avec le Grand duché de Lituanie. A la fin de cette guerre, les polonais tentent de prendre la forteresse de Malbork, mais les 1000 habitants du château de Malbork résistent à ce siège qui dure deux mois !
Durant les années qui suivent, plusieurs conflits militaires éclatent, d’un côté les Teutoniques, aidés de nombreux mercenaires, de l’autre côté, les armées du royaume de Pologne, de la Confédération prussienne et du Grand-Duché de Lituanie. En particulier, la guerre de 13 ans (1454-1466) met à mal les finances de l’ordre Teutonique et le grand maître de l’époque est contraint de céder la propriété du château de Marienburg aux mercenaires car il n’est plus capable de payer (les teutoniques s’installent alors à Kaliningrad). Ces derniers revendent aussitôt la forteresse au royaume de Pologne en 1457. Malgré leurs efforts, les Teutoniques ne réussirent pas à inverser la tendance, et en 1525, la Prusse teutonique devint une principauté sous vassalité polonaise.
Le château reste entre les mains des rois polonais jusqu’en 1772, où il est repris par les prussiens qui revendiquent l’héritage teutonique.
Lors de notre visite, nous sommes particulièrement impressionnés par la taille gigantesque des cheminées dans les cuisines des châteaux haut et moyen, et par le système de chauffage au sol de l’époque. Et aussi surpris d’apprendre que l’ordre existe toujours aujourd’hui, mais se consacre à des œuvres de charité.
Les statues de 4 grands maîtres de l’ordre teutoniqueUn document régissant l’ordre teutonique avec les sceaux des personnes les plus influentesReprésentation des scènes de bataille des chevaliers teutoniques
Outre la découverte des nombreuses pièces des châteaux, nous voyons aussi des expositions thématiques.
L’une d’elles concerne l’ambre, particulièrement présente le long des côtes de la Baltique et dans la région de Gdansk. Nous voyons pas mal d’objets faits avec de l’ambre (objets sacrés, jeu d’échec, boîtes, …), des bijoux remontant jusqu’à 800 avant JC, d’autres beaucoup plus récents et pour certains bien moins esthétiques à notre goût.
Une autre expo concerne bien sûr les armes et armures depuis l’âge de fer jusqu’au 17e siècle.
Enfin une dernière retrace les longues années de restauration de la forteresse. En effet, à la suite du déclin de l’ordre, le château revenu à la Pologne a été laissé dans l’oubli, avant d’être converti en caserne (1737-1744), et réaménagé pour héberger une garnison prussienne, au mépris du patrimoine (1780-1803). A partir de 1817, grâce à l’intervention du poète Von Schenckendorf, et au romantisme en vogue à l’époque, des travaux de restauration ont été lancés. Cela a également été soutenu et poursuivi par l’empereur Guillaume II de Prusse (le même qui avait fait rénover le Haut Koenigsbourg, d’aailleurs, le Haut Koenigsbourg formait la limite ouest de son empire, et la forteresse de Malbork la limite est).
A nouveau bien détruit pendant la 2e guerre mondiale (il servait alors de bastion pour l’armée allemande, et a été fortement bombardé par les russes), il a encore une fois été reconstruit, dans son état actuel.
Nous avons beaucoup apprécié cette visite, qui encore une fois s’est faite au moyen d’un audioguide en français passionnant (d’ailleurs, c’est la même société qui a produit cette visite que pour le musée de Gdansk sur Solidarnosc).
Après ça, nous roulons vite et bien (surtout vite au final, car notre trajet longe une nationale bien chargée avec des camions – pas cool) jusqu’à Elblag. Nous y avons trouvé une petite chambre dans un camping, où nous sommes bien installés.
Au moment de partir le lendemain, nous rencontrons nos voisins de camping, deux polonais à vélo aussi. Nous échangeons rapidement sur nos itinéraires respectifs avant de prendre la route.
Quel plaisir aujourd’hui ! Le temps est radieux, la route est en très bon état, vallonnée, nous prenons notre pied dans de grosses descentes, la journée passe bien vite, les kilomètres aussi. Dans la matinée, nous avons à plusieurs reprises un beau point de vue sur l’immense lagune de la Vistule, commune à la Pologne et à l’enclave de Kaliningrad.
Nous faisons une belle pause aussi à Frombork, où se trouve une autre forteresse teutonique. Heureusement, bien moins grande que celle de Malbork ! Nous y visitons la cathédrale, c’est ici que Copernic est enterré !
La stèle en l’honneur de CopernicPeut-on parler de mauvais goût ?Bis – Difficile de ne pas rire devant l’expression de cette statue !
Et nous montons en haut du donjon pour apprécier le panorama alentour. Super !
Le pendule de Foucault dans le donjon
Et comme les astres sont bien alignés ce soir, nous repérons un camping à un endroit idéal par rapport à notre avancée du jour (92 km quand même !). A notre arrivée, agréable surprise, il s’agit d’un terrain chez l’habitant, tout petit et très sympa. Il y a juste une caravane en plus de nous. Nous sommes accueillis par Wojciech, la soixantaine, germanophone, qui a l’air tout content de nous recevoir, ce qui fait plaisir ! Nous nous voyons offrir un shooter de schnaps, “pour se remettre de la journée”, puis un deuxième “pour la deuxième jambe”, et un troisième pour “le troisième pied” !! Le tout accompagné de poisson fumé, miam ! Nous repartons aussi à la tente avec deux grosses couvertures, car il a peur que nous ayons froid. Vraiment trop sympa ce monsieur.
Bon du coup bizarrement, à 21h on est bien bien fatigué et on se couche sans demander notre reste.
La nuit n’a pas été des plus bonnes, malgré les couvertures chaudes que notre hôte nous avait donné ! De mon côté, j’ai rêvé qu’on se faisait charger dans la tente par des sangliers… rien que ça ^^
Alors que nous étions prêts à partir, Wojciech nous attrape et nous offre du jus de sureau, fait par sa femme, pour nous donner de l’énergie sur la route. Il nous remercie d’être venus, car pour lui, nous sommes “des voyageurs exotiques” ! Nous sommes touchés par sa gentillesse 🙂
Notre route traverse de nouveau de beaux paysages champêtres, nous sommes sous le soleil, tout va bien… Sauf la route ! Encore des chemins très cabossés qui nous en font voir de toutes les couleurs. Nous faisons encore pas mal de dénivelé aujourd’hui, mais nous ne pouvons même pas profiter de la descente, car la route est tellement mauvaise qu’il faut freiner en permanence !
Voilà l’automne qui pointe le bout de son nez !
Le midi nous nous arrêtons manger dans un petit patelin, à la cantine locale. De supers plats typiques (soupe, patate, porc), bons, pas chers, le top.
Et pour finir, le soir, comme nous ne trouvons aucun camping ni hébergement (c’est assez perdu là où nous sommes !), nous demandons à des passants s’ils savent où nous pourrions nous installer, et ils nous indiquent un parc pour enfants, avec des tables de pique-nique : c’est parfait !! Il y a même un robinet à l’extérieur, grand luxe.
Le beau ciel étoilé au-dessus de nos tête ce soir-là
Notre route nous mène aux villes de la Tricité : Gdynia la portuaire, Sopot la balnéaire et Gdansk la perle (c’est pas nous qui l’avons inventé). Gdynia est assez impressionnante, pas très belle, avec pleins d’immeubles de l’ère soviétique. Pas de quoi s’y arrêter sauf que… nous nous y faisons héler par un autre cycliste, qui vient d’ici, et nous tape la causette pendant que nous roulons. Puis Tomasj (c’est son nom) nous propose de nous emmener dans un resto typique, pas cher, et qui remplit bien. Super 🙂 Nous voilà donc à notre premier bar mleczny, ou bar à lait (plus d’info ici), une espèce de self où nous choisissons de la nourriture sans trop savoir ce que c’est. C’est plutôt bon, et ça correspond en tous points à la description qu’il nous en a faite.
Super rencontre, et nous revoilà en direction de Sopot. La description du Routard était plutôt alléchante (plus grande jetée en bois de la Baltique, joli centre…), nous nous retrouvons dans une espèce de Disneyland, avec certes de beaux hôtels, mais aussi tellement de boutiques de touristes, d’invitation à la consommation… Et pour couronner le tout, l’accès à la jetée est payant ! On est dégouté et on repart vite de cette ville.
Nous arrivons alors à Gdansk, et à l’hôtel que nous avons réservé. L’arrivée est assez spéciale : rien n’indique que c’est un hôtel, le proprio est peu avenant, la voisine du RDC (en fait l’hôtel c’est plus un appartement au 2e étage, avec 3 chambres) nous regarde de travers … Nous ne savons pas trop où nous allons pouvoir mettre notre vélo, et le proprio a disparu après nous avoir dit que la chambre n’était pas encore prête. Le mari de la dame du RDC arrive, essaie de nous parler (on arrive pas du tout à savoir si c’est amical ou non, si c’est notre vélo dans le hall de l’immeuble qui gêne… étrange !). Il disparaît chez lui, et on l’entend échanger avec sa femme. Difficile de savoir la teneur de leurs propos mais à l’oreille on dirait bien qu’ils s’engueulent ! Mais comme on a déjà eu cette impression quelques jours avant chez d’autres gens, difficile de savoir si ce n’est pas juste leur manière de parler.
Puis il ressort, sa femme avec, le proprio réapparaît, et tout le monde sourit : ils nous ouvrent la cave et nous pouvons y laisser Steven. Ouf !! Et nous n’avons toujours pas compris mais au moins, on a eu des sourires !
Ce soir, nous n’avons pas le courage de ressortir dans le centre ville, qui est à une vingtaine de minutes à vélo, et mangeons donc au resto juste à côté de la chambre. Nous en profitons pour faire notre lessive, youpi !
Nous levons la voile tôt le matin suivant, pour profiter pleinement de notre journée à Gdansk. Nous allons directement dans la “ville principale” (glowne miasto), et arpentons la rue principale Dluga et ses voisines, dont la rue Mariacka. L’ensemble est très beau, et tout neuf, car la ville a été quasiment entièrement bombardée lors de la seconde guerre mondiale, et tout a été reconstruit à l’identique par la suite. Dans cette zone, c’est terminé, mais d’autres quartiers de la ville sont encore en reconstruction.
Nous peinons à visiter la basilique Mariacka, la plus grande église de Pologne, et l’une des plus grandes églises en briques au monde. En effet, il semblerait que ce soit très souvent la messe ici : 7h, 9h, 10h, 12h et 18h !! Fiou !
Nous visitons l’hôtel de ville, au sein duquel sont visibles quelques belles pièces, et un musée de l’histoire de la ville. Malheureusement très peu d’explication dans une langue autre que le polonais, donc pour nous ça reste bien fouillis tout ça. En revanche, nous pouvons monter en haut de la tour et admirer la vue tout autour, ça c’est chouette.
Nous nous balladons aussi le long de la Vistule, où se trouve la plus grande rue de l’Europe médiévale, qui était actionnée au moyen de deux roues entrainées par des hommes qui marchaient dedans. Sur l’autre rivage, les immeubles ont été reconstruit et leur architecture est assez réussie.
Nous faisons une pause le midi dans un resto lituanien où nous mangeons de délicieux kibinys (sortes de pains fourrés, cuits au four).
De quoi prendre des forces avant notre prochain musée : Europejskie Centrum Solidarnosci, ou Centre Européen des Solidarités. Le bâtiment est implanté à l’endroit même où ont eu lieu toutes les grèves sur les chantiers navals de Gdansk. Il est immense, vêtu de plaques à l’aspect rouillé, et super classe à l’intérieur.
Nous le visitons grâce à un audioguide très complet et passionnant, en français. Nous y découvrons les étapes qui ont mené à la création du syndicat Solidarnosc et les combats menés par ses membres pour les droits du travail des polonais sous le joug communiste. Nous restons des heures ici, sans voir passer le temps, nous découvrons cette partie de l’histoire que nous connaissions si peu ! Nous sommes plutôt d’accord pour dire que c’est l’un des meilleurs musées qu’on a jamais vu !
A notre sortie, nous regardons d’un autre oeil le mémorial à l’entrée, constitué de trois immenses croix (40 m de haut !), qui nous avaient laissé de marbre à notre arrivée, qui commémorent les ouvriers des chantiers navls tombés sous les balles de l’armée lors des grèves de 1970.
Nous retournons à notre hôtel, non sans avoir pris une petite bière locale avant.
Enfin, nous quittons Gdansk après avoir jeté un coup d’œil à l’église Sainte Brigitte, avec son autel en ambre impressionnant.
Nous rangeons vite nos affaires ce matin, et enfourchons notre monture, pour franchir les derniers kilomètres qui nous séparent de la Pologne.
A peine la limite dépassée, nous nous arrêtons pour prendre un bon petit dèj bien copieux, qui nous lance sur cette journée. La météo s’annonçait mauvaise mais on a quand même du ciel bleu, donc on en profite.
Nous quittons l’île Usedom (commune donc à l’Allemagne et à la Pologne) grâce à un ferry gratuit (!), et traversons de grandes forêts. On profite des rares instants où le soleil arrive à percer au travers des nuages et des grands arbres, dont certains sont affublés de petits nichoirs.
Nous passons également plusieurs zones militaires au milieu de la forêt, dont une où nous entendons des coups de feu, ce qui n’est clairement pas rassurant.
La journée suivante est assez similaire, beaucoup de forêts, et par contre, de la bonne grosse pluie.
Bon mais nous avons un warmshower qui nous accueille le soir, alors ça ne nous démoralise pas !
On arrive donc au point de rendez-vous, et le fils vient à vélo nous donner les clefs. On parle un peu, la famille semble très occupée à refaire la peinture de leur maison principale. On s’installe dans cette maison de vacances, l’intérieur est plein de moquette. Le matelas, par terre, est recouvert de couvertures très épaisses. La pièce est petite, plutôt sombre (par un temps très pluvieux) alors on allume la lumière. Celle-ci est bleutée et très puissante (un peu comme dans un hôpital ^^). On s’assoit dans le petit canapé. La pièce, l’humidité et le silence sont étouffants… On prend une douche (l’eau est juste tiède, car le chauffe-eau était éteint avant notre arrivée). Et on attend …. Nous avions cru comprendre que nous rencontrerions la famille alors on attend un signe (peut-être mangerons-nous avec eux dans une ambiance chaleureuse à parler des aventures de chacuns !) ! 20h30… forcés de constater que rien ne se passera ce soir ! Il pleut des cordes, alors on prend ce qu’on a à manger (une unique boîte de sardines et du pain)…. Bon appétit ! Avec Mathilde on est mort de rire, sacrée désillusion !! 😀 Mathilde bouquine, pour ma part je regarde quelques reportages assez déprimants sur arte.tv… On se couche… Bonne nuit !!
La pluie est toujours là ce matin, Mathilde a repéré un café (5/5 !!!) pour prendre un petit dej revigorant ! Les gâteaux sont savoureux ! L’un d’eux est plein de chantilly, mais c’est très léger et très bon avec les fruits à l’intérieur ! Et le Mocha me rappelle l’excellence du café jaune à Londres, quel bonheur ! Par la fenêtre on peut voir les cordes tomber… On ne se presse pas trop !
Le temps de passer à un décath pour racheter un short de vélo et quelques babioles pour entretenir le vélo !
Il est déjà tard et il fait frais, on trouve sur internet un logement qui nous semble bien ! Par contre, cela semble plutôt difficile d’y accéder si on regarde la carte (cf. localisation de l’article sur la page d’accueil du blog !). Qu’importe, on réserve et on met les bouchées doubles pour arriver au plus vite ! On longe d’abord pendant un très long moment une autoroute en construction. C’est bien droit, et très long… Heureux de la quitter, on s’engouffre dans un chemin forestier qui semble s’enfoncer dangereusement au plein cœur de la forêt. Après quelques kms, on a l’impression d’être perdus au beau milieu de nul part et le chemin devient de plus en plus impraticable (et les moustiques attaquent !). Il est tard et le jour tombe, impossible de faire demi-tour. Le chemin est parsemé d’ornières de presque un mètre de haut et remplies de boue, on marche, on essaie de pousser le vélo qui glisse dans tous les sens. On craque, on est morts de rire (nerveux certainement) !
On regarde une nouvelle fois la réservation, en croyant s’être trompés d’adresse. Tout semble pourtant coller pour la carte, la réception “ouverte 24/24” semble quand même difficilement imaginable au milieu de cette forêt. Je dis à Mathilde en soupirant : “c’est sûrement une arnaque, nous sommes sûrement les seuls candides ayant marché jusqu’ici !”.
Impossible de marcher sur le chemin, alors on passe avec le vélo dans la forêt coûte que coûte. Il nous reste 1 km avant d’arriver sur le point noté sur la carte.
Avec de la boue jusqu’aux genoux, trempés nous arrivons finalement sur le précieux point et d’un coup une clairière avec des maisons apparaît dans la pénombre tombante ! Incroyable !!
La porte de l’une d’entre elle s’ouvre et Henryk nous accueille. Nous pensions avoir réservé une chambre et nous sommes finalement logés dans une petite maison avec un feu !! Henryk nous offre du pain, du beurre et des œufs, nous allume même le feu,et on s’installe les pieds vers la cheminée qui crépite. On est aux anges tellement c’est accueillant et réconfortant !!
On se lève le lendemain en entendant la pluie dehors. On est vraiment super bien logés, et on décide de rester une nuit de plus ! Reste à demander au propriétaire !
On retrouve Henryk qui nous propose même un café et des gâteaux home made ! La conversation n’est pas facile, quelques mots d’allemand nous permettent de communiquer (car les traducteurs sur téléphone, ça ne marche parfois pas terrible !)
Il nous parle de l’URRS, du communisme tel qu’il l’a vécu. La faim, la pauvreté…. Et de l’espoir qu’a représenté alors l’ouest de l’Europe et le capitalisme (où on pouvait manger et où les toilettes étaient propres). Depuis cette période, lui et sa femme ont construit petit à petit des maisonnettes destinées à accueillir et loger des touristes cherchant à vivre près de la ferme (dans le cadre du label “agroturystyka”) Et ça fonctionne très bien 🙂
Pas facile de faire quelques courses par ici, alors Henryk nous propose un petit tour en voiture. Nous découvrons la “route” officielle qui dessert sa maison. C’est quand même plus praticable !! Mais ça reste les fameux blocs de béton troués. Pas de ceinture ici, et on découvre qu’avec de l’habitude, on peut rouler très vite dans ces chemins ! La jauge d’essence ainsi que le cadran indiquant la vitesse ne fonctionnent plus.
La voiture broute puis s’arrête… Qu’à cela ne tienne, Henryk sort, ouvre le coffre, prend le bidon d’essence et nous sommes repartis ! Normal semble-t-il !
Nous passons une station service qui semble être d’un autre temps, puis nous arrivons à l’épicerie (“sklep”). On en croisera beaucoup par la suite, et ce sont très souvent de mini magasins, dans des bâtiments qui semblent très vieux, voire abandonnés, et avec des fois juste un frigo pour quelques produits frais. La plupart du temps, on y trouve des sortes de saucisses, des chips et de la bière : pas grand chose de plus… c’est assez dépaysant.
Nous consacrons notre aprem à prendre soin de Steven, notamment des chaînes qui ont bien souffert ces derniers jours dans les chemins, le sable, sous la pluie… Cette journée off file à toute allure mais fait le plus grand bien.
Comment ne pas se sentir bien dans ce petit chalet ?! 🙂La vue depuis le chalet !
Après cette pause salvatrice, nous repartons requinqués, et motivés par le soleil qui brille de nouveau ! Nous faisons bien attention de ne pas reprendre le même chemin qu’à l’aller, et empruntons donc la “route” (des alignements de blocs de bétons qui secouent) en redoublant de vigilance, maintenant qu’on a vu à quelle vitesse les locaux pouvaient rouler ! Nous retrouvons le littoral et ses petits villages Disneyland.
La taille des glaces ici est totalement démesurée !
Depuis notre arrivée en Pologne, nous sommes bien chahutés par les différentes routes que nous empruntons. Autant, parfois c’est super bien aménagé, digne des pays les plus cyclables d’Europe, autant souvent, c’est très chaotique ! Entre les chemins pleins de cailloux ou recouverts de sable, on fait de beaux dérapages. D’autres fois, ce sont des plaques de béton posées les unes contre les autres. Soit elles sont de toute la largeur de la route, soit juste de la largeur des roues (et donc sur deux files), et avec de gros trous dedans (mais pourquoi ??). Nous voyons aussi des pavés hexagonaux, qui confèrent un peu un style d’orgues basaltiques (orgues bétonitiques ?) à la route. Dans tous les cas, ces routes-ci nous secouent énormément, car la liaison entre les différents éléments n’est jamais bonne. Il y a aussi des passages où, même si elle est recouverte de bitume, on dirait un patchwork tellement elle a été raccomodée à de nombreuses reprises (et ça nous secoue dans tous les sens !).
Deux files de plaques de béton avec des trousLes orgues bétonitiquesBon là c’est la cata, pas moyen de passer à vélo, il faut pousser !Des pavés irréguliersUn beau patchwork de bitumeTout est aplati sur les photos et ça ne semble pas si difficile que ça mais on vous assure que si, ça secoue dans tous les sens !
Bref, refermons cet aparté route.
Nous dormons dans un tout petit camping près de Utska, dans le jardin d’une grande maison. C’est tout mignon, il y a plein de fleurs, des petits lampions pour éclairer la nuit, des tables de pique nique, bref, on y est super bien.
Le lendemain, nous nous engageons dans le parc national de Slowinski.
Ça commence plutôt bien, on est au frais sous les arbres, on voit encore plein de petits champignons…. Mais au bout d’un moment, la route commence à faire des siennes !! Il y a beaucoup de dépôts de sable, et on dérape à fond. C’est un peu drôle, mais surtout ça nous ralentit beaucoup et c’est bien fatigant pour le pilote ! On a beau s’éloigner un peu du littoral, les chemins forestiers restent couverts de ce sable. C’est chiant !!
Mais à ce moment, on ne s’attendait pas à l’obstacle qui allait survenir ensuite : on traverse un paysage de tourbière, le sol est gorgé d’eau et d’ornières (bon pas aussi grosses que celles pour aller chez Henryk, mais impraticables elles aussi !). Il y a bien des pontons parfois, censés nous aider à traverser tout ça. Sauf qu’ils sont envahis d’orties, et qu’il faut passer une marche d’une trentaine de centimètres pour monter dessus ! Bref, autant dire qu’on passe de longues minutes à marcher et pousser le vélo, hésitant entre le rire et l’énervement. On est quand même rassurés de croiser quelques personnes, aussi enchantées que nous par la situation.
Quand enfin nous arrivons à bout de ce chemin, nous retrouvons presque avec plaisir les fameux pavés troués qui secouent, mais sur lesquels au moins, on peut rouler. Nos péripéties nous ont quand même bien fatigués, et nous nous cassons la margoulette ! Première chute du voyage ! Par chance, c’est assez lent, et nous tombons dans de hautes herbes, donc c’est moelleux à l’arrivée. Sauf que… ça pique !! On est dans les orties !
Bref, une journée éprouvante et nous sommes bien soulagés quand nous nous arrêtons pour la soirée !
Le lendemain, la route est aussi bonne que celle d’hier était mauvaise. Ca fait plaisir !
Sur la fin, on a même une voie verte comme celle au pied de chez Mathieu : une ancienne voie ferrée reconvertie. Ca roule tout seul, c’est génial.
Nous dormons ce soir dans un camping bien minimaliste, sans charme, aux abords de la ville de Puck. Il y a quelques caravanes abandonnées, nous squattons la table devant l’une d’entre elles.