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De Gênes à Nice

Après un 2e petit dej au café d’Emilio, nous quittons la ville de Gênes sous un ciel bien lourd. Enfin, nous roulons pour sortir de la ville, car c’est très long, très industriel, et pas du tout équipé pour les vélos ! Du coup, c’est assez laborieux et ce n’est qu’après une vingtaine de km que la densité des habitations et industries commence à se réduire et qu’on peut enfin apprécier un peu. 

Un peu voire même beaucoup quand soudain on aperçoit des dauphins dans la mer !!! Quel spectacle ! On s’arrête de longues minutes pour les contempler, voir leur nageoire dorsale sortir de l’eau, et s’extasier quand ils sautent. On est tout content ! 

La route suit le contour de la montagne, parfois nous passons quelques tunnels mais jamais très longs, c’est bien agréable. Sur un tronçon trop court à notre goût, nous suivons le tracé d’une ancienne voie ferrée réhabilitée en voie cyclable. Un pur régal ! 

Par contre, lorsque vient l’heure de trouver un endroit où dormir, ça se corse : on est coincé entre la montagne et la mer pas loin de Finale Ligure ! Et dès qu’il y a des habitations, tout est privé. Même les chemins pour monter vers les tours fortifiées qu’on aperçoit un peu plus haut ! C’est un véritable casse-tête, et on finit par se trouver un coin tout bof au bord d’un port de plaisance, où il est bien écrit « interdit de camper », mais on a plus d’espoir de trouver quelque chose de bien. Pas sûr qu’on dorme sur nos deux oreilles, mais tant pis ! 

Nous cuisons nos pâtes, ajoutons le Parmigiano que nous a donné la maman de Francesco et que j’ai râpé avec une râpe achetée spécialement pour l’occasion. Personne ne vient nous embêter, tout va bien. 

Le réveil sonne tôt le lendemain matin, et au final, nous n’avons pas si mal dormi que ça (mais on va quand même pas dire qu’on a bien dormi 😅). 

Nous quittons ce coin de bivouac et allons nous promener dans le centre historique fortifié de Finale Ligure, qui a été élu plus beau village d’Italie. Ce sont des dédales de ruelles étroites, bordées de maisons colorées, avec souvent les volets verts et le linge qui sèche à la fenêtre. C’est bien agréable ! On fait aussi un crochet par la collégiale San Biagio, dont l’intérieur est lourdement décoré !

Nous reprenons la route qui longe le littoral. Elle est toujours aussi fréquentée qu’hier, et nous ne voyons aucune piste cyclable de la journée. Difficile d’imaginer ce que ça doit être en été ! 

Nous nous arrêtons à nouveau un court instant dans le village d’Albenga, le temps de visiter quelques églises et puis on arrive enfin à Imperia, après avoir affronté une côte bien raide de 200m positifs. 

Nous y visitons un musée de l’olive et son huile, attenant à l’entreprise Carlo Carli. Y sont exposés d’anciens pressoirs, beaucoup d’objets liés à l’huile d’olive et remontant pour les plus anciens à l’époque des égyptiens. Et dans un autre bâtiment, on peut voir les machines actuelles utilisées par l’entreprise ! Dommage pour nous, ils ne sont pas en activité aujourd’hui, on doit donc se contenter d’une vidéo pour les voir tourner. 

À la sortie, on se voit même offrir 3 fioles d’huile d’olive !! Autant dire qu’à l’entrée quand ils nous avaient parlé d’un « petit cadeau » à la fin, on ne s’attendait pas à autant ! Voilà de quoi agrémenter nos pâtes jusqu’à notre retour ^^

Nous ne roulons que peu ensuite, car nous tombons sur un parc en bord de mer, et la journée est déjà bien avancée. C’est culotté, car dans la ville même d’Imperia, mais nous décidons de nous y installer pour la nuit.

De même qu’hier, le réveil sonne bien tôt ce matin, mais c’est nécessaire vu notre emplacement de tente 😅 On replie tout bien vite, juste à temps pour le premier promeneur de chien. Ouf ! 

On remonte en selle et on retrouve la route bien passante. Mais dès San Lorenzo Al Mare, nous empruntons une nouvelle voie verte, sur le tracé d’un ancien chemin de fer. C’est super cool et on croise des milliers de cyclistes (personne ne travaille ici ?!), et des petites guinguettes en bord de mer, ou bien sur nous nous arrêtons pour une pause café et panettone ! 

Peu avant Vintimille, on bifurque pour s’engager dans la vallée de la Nervia, vers le nord. Le paysages nous régalent, le soleil illumine les couleurs des petits villages, le tout réhaussé du jaune éclatant des mimosas. Dans un premier temps, on traverse le village de Dolceacqua, avec son château en ruine et son pont courbé qui nous rappelle celui de Mostar en Bosnie.

Puis on arrive à Isolabona, plus loin dans la montagne. Voilà encore un magnifique petit village perché, et qui nous semble plutôt vivant, d’autant plus qu’on y est à l’heure de la sortie des classes.

Pour dormir, on repère une maison un peu à l’écart du centre du village, en hauteur, avec tous les volets fermés. De l’extérieur, elle ne semble pas trop habitée (résidence secondaire ?). Le petit chemin qui y mène nous semble parfait pour passer la soirée et la nuit, et on s’y installe discrètement. Alors que Mathieu finit tout juste de prendre sa douche (toujours à poil, dans le chemin), j’aperçois en bas deux mamies qui arrivent. Mayday mayday !! Elles sont un peu surprises de nous voir ici (et nous aussi – finalement, c’est habité cette maison !), mais nous autorisent à rester, juste une nuit hein ! C’est super, au moins, on n’a plus rien à craindre !

La nuit a été plutôt tranquille, puisqu’on n’avait pas peur d’être surpris. Au réveil, le ciel est tout voilé, et nous sommes un peu frustrés de ne pas avoir poussé jusqu’au village d’Apricale hier soir (à environ 5 km de là), pour profiter des belles lumières sur ce bourg perché sur un éperon rocheux !

On y roule quand même, l’occasion de découvrir un très beau village, mais totalement endormi à cette période de l’année. On a été très inspiré de prendre notre petit-déjeuner avant de partir, car il n’y a pas un seul café d’ouvert ici, on est bredouille ! C’est bien dommage, et on ne s’attarde donc pas ici.

Demi-tour, on repart vers Vintimille.

Quelques minutes après … voilà la frontière française qui se profile !!! Y a pas à dire, ça fait bizarre de se retrouver là après si longtemps ! On pensait faire une belle photo, mais à notre surprise, nous sommes accueillis à la frontière par une horde de camions de gendarmes, et des militaires italiens. C’est très déroutant, et c’est bien la seule frontière de l’espace Schengen qu’on ait traversée qui soit comme ça ! C’est pas super engageant comme accueil. On fait quand même notre photo devant toute cette armada, et on poursuit vite notre route.

On atteint rapidement Menton et son centre historique tout coloré.

On a de la chance, c’est en ce moment la fête des citrons, et nous pouvons aller admirer les immenses statues entièrement composées de citrons et d’oranges. Ça nous rappelle un peu les mosaïcultures de Montréal !

On passe aussi par l’hôtel de ville où sont exposées de nombreuses orchidées.

On en profite bien, et il nous faut ensuite nous éloigner un peu du centre ville, pour trouver un endroit où dormir. Et c’est là que les galères commencent ! En effet, il nous est impossible de trouver un endroit où nous installer. Toutes les parcelles sont privatisées, les campings sont soit “fermés pour les tentes” (merci de nous expliquer ce que ça veut dire), soit on nous propose généreusement un emplacement tente pour la modique somme de 27 euros 😳 Pas plus de succès en frappant chez les gens : “ah non vraiment, je ne vois vraiment pas où vous pourriez mettre votre tente” (devant son immense jardin), « l’herbe est mouillé, et puis ma femme me tuerait si j’acceptais, mais vraiment ça m’aurait fait plaisir », « pas possible à cause de mes chiens », « pas chez moi, sûrement pas ici”… Sympa l’accueil. Ça nous rend un peu triste, surtout que c’est notre premier contact avec nos concitoyens !

10 km plus tard et 300 m plus haut, on finit par se trouver un coin dans un sous-bois au bord d’un chemin de terre et pas loin de l’autoroute. Pas glamour, mais bon, la nuit est tombée, et ça ira bien pour ce soir !!

On s’installe rapidement à la lumière de nos frontales, quand soudain une voiture passe en contrebas et s’arrête à notre hauteur. Dans notre tête, c’est directement : les flics nous ont déjà retrouvés ????? On descend voir, et on voit un monsieur au téléphone : est-il en train d’appeler les flics ??? Vu la gentillesse des gens dans le coin on devient parano XD Car au final, c’est juste un monsieur qui a reçu un coup de fil et qui s’est arrêté là pour répondre. 

On se dépêche de manger et on se couche aussitôt.

Bon, ce n’est pas la nuit du siècle, entre le vacarme de l’autoroute (la circulation ne s’arrête jamais la nuit ???), des jeunes qui mettent la musique pas loin, et un tas d’autres petits bruits. Au réveil, la tente est complètement trempée d’humidité, et il nous est bien impossible de la faire sécher ici. On repart rapidement, on fait coucou à toutes les maisons qui nous ont envoyé bouler hier soir, et on retrouve la côte.

Quelques kilomètres plus loin, nous voilà à Monaco. Tout le monde nous a déconseillé d’y aller, mais bon, on se dit qu’on aura probablement jamais l’occasion d’y retourner, et on est bien curieux, donc on se lance. Bienvenue au pays du blingbling, des buildings,… tout sauf le paradis de deux cyclo-touristes. Mais bon, nous pourrons désormais critiquer de manière avisée !

On poursuit la route, ça monte, ça descend, rien n’est aménagé pour les vélos, ce n’est pas une partie de plaisir. On fait un détour par le phare au bout de la presqu’île de Saint Jean Cap Ferrat, et on arrive finalement à Nice. C’est très différent de ce que j’avais imaginé, les maisons sont très colorées, c’est beau ! Par contre, on découvre de loin le fameux carnaval de Nice, mais de loin, car des palissades hautes de plus de 2 m ont été dressées tout autour pour empêcher les simples badauds de profiter du spectacle. Du coup, ce qu’on voit, ce sont des gens, adultes comme enfants, massés à l’arrière des palissades et qui essaient d’entre-apercevoir le spectacle au-travers du petit centimètre qui sépare les barrières. C’est d’une tristesse !

Nous arrivons ensuite chez Eric et Victorija, qui nous hébergent chez eux ce soir, et que nous rencontrons grâce à warmshower. Eric, passionné de vélo, travaille chez Décathlon, et Victorija, d’origine de Macédoine du nord, mais émigrée aux USA pendant 18 ans et finalement arrivée en France 5 ans plus tôt, est oenologue et autrice de livres sur la cuisine méditerranéenne. On est tout de suite bien à l’aise avec eux et nous passons un super moment, autour d’un bon vin bien sûr ! La soirée passe en un battement de cil, on aurait l’impression de pouvoir discuter encore des heures !

Cette nuit, Eric et Victorija nous ont laissé leur appart, et on en profite pour dormir un peu plus tard le matin, d’autant plus qu’on n’a pas une grosse journée devant nous. A notre départ, et sur leur conseil, on fait un stop au “Kiosque Tintin” pour acheter le meilleur pain bagnat de la ville, qu’on mange plus tard au bord de la mer. C’est vrai qu’ils sont bons !

Jusqu’à Cagnes sur Mer, nous empruntons une piste cyclable plutôt bien aménagée et très fréquentée. On est content ensuite d’enfin s’éloigner de la côte et de retrouver petit à petit des paysages plus sauvages. Il fait beau, les mimosas sont en fleurs, le paysage nous régale. On longe le Loup, on grimpe, et nous voici arrivés au Rouret, le village où Mathilde et Victor, nos copains de Montréal, se sont installés. Quel plaisir de revoir des amis et de prendre l’apéro ensemble ! Les discussions vont bon train, nous passons une super soirée.

Après une bonne nuit de sommeil, nous quittons la belle maison de Mathilde et Victor. Comme prévu par la météo, le vent souffle très fort et par rafales, c’est vraiment impressionnant. En plus, on a toujours ce rayon cassé et on aimerait bien le réparer avant de s’engager dans les routes montagneuses qui s’annoncent. Par chance, on trouve sur warmshower un couple de retraités néerlandais cyclotouristes chevronnés… à 5 km de là ! Jenny et Kees nous accueillent chez eux et nous réparons nous-même ce foutu rayon. On découvre alors que notre jante n’a pas apprécié particulièrement les derniers jours/semaines/mois (?) : quelques fissures la parcourent au niveau des liaisons avec les rayons. Oups !! Espérons que ça tienne encore pour les derniers kilomètres qui nous restent jusqu’à la maison ! 

C’est à ce moment que Jenny survient : vous mangez avec nous ? Cela nous fait vite oublier les problèmes mécaniques. C’est super, on mange que des légumes, nos corps en sont ravis ! Pour couronner le tout, de délicieuses olives du jardin et de la tapenade maison. Un régal ! Comme la tempête ne semble pas faiblir, ils nous proposent également de dormir chez eux, ce qu’on accepte avec plaisir. On en profite pour aider Kees qui débroussaille une partie de son jardin, et ensuite, Jenny nous montre les photos de leurs impressionnants périples. Nous sommes pleins d’admiration devant ce couple de 79 et 76 ans, touchants, pleins de vie, pleins de bonne humeur, ils sont très inspirants.

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Les Alpes liguriennes

Nous sommes prêts pour reprendre la route, droit vers les montagnes ! On est content de les voir se rapprocher, après ces derniers jours dans la plate plaine du Po. Nous roulons bien, tout marche à merveille, il y a des cyclistes partout ! Nous faisons une bonne pause picnic sur la place ensoleillée d’un village, tout est agréable. Tout, sauf ce rayon qui pète dans l’après-midi !!! Fait chier ! 

Quand nous atteignons Bobbio, les deux magasins de vélo refusent de nous aider (l’un d’eux est d’ailleurs vraiment pas aimable), nous voilà donc obligés de poursuivre comme ça jusqu’à Gênes sur les 100 prochains km 😒 

On roule encore quelques km au travers de gorges sombres et profondes, avant de s’installer pour bivouaquer dans un endroit où c’est un peu plus ouvert et moins froid. La météo annonce 3 degrés pour cette nuit, ça devrait bien se passer ! 

Sauf qu’à 19h, il fait déjà 2 degrés, on a froid et on comprend que la météo s’est bien jouée de nous. Combien va-t-il faire ??? 

En prévision, on décide de tester une astuce que d’autres cyclo-voyageurs nous ont donné : on fait chauffer de l’eau, on remplit notre gourde et on la met dans mon duvet au niveau des pieds. Petite chaleur réconfortante 🥳

Nous sommes contents d’entendre le réveil le lendemain car il met fin à une nuit bien froide. -1 degré dans la tente, -6 degrés à l’extérieur 😱 Comme on est dans une vallée, le soleil met longtemps avant d’apparaître et de nous réchauffer un peu. Nos gourdes sont remplies de glaçons (heureusement qu’il y en a une qui est restée dans le fond de mon duvet et qui nous permet d’avoir un peu d’eau ce matin !), notre serviette de toilette est cartonnée, car gelée ! On peste fort contre cette météo qu’on a regardé hier soir sur internet et qui nous annonçait 3 degrés ! 

On quitte notre lieu de bivouac, et « par chance » nous avons beaucoup de montée aujourd’hui, dès les premiers coups de pédale, et nous nous réchauffons finalement assez vite. La route est belle, nous voyons beaucoup de petits villages colorés perchés sur les flancs de la montagne, tous dominés par un grand clocher d’église. 

Peu avant la fin de la montée, un ting caractéristique survient : un rayon casse à nouveau, s’ajoutant à celui d’hier. Nous avons donc une roue amputée pour finir la journée, mais heureusement la descente les sollicite moins, et on arrive à Gênes sans autre problème. Une longue descente de presque 30 km, avec quelques tunnels, on dévale les routes avec le sourire !

À Gênes, nous sommes hébergés chez Emilio et sa femme et leurs deux enfants, rencontrés via le réseau bewelcome. Nous passons une bonne soirée ensemble, dégustons les vraies pâtes fraîches au pesto à la genovese (et on peut le dire, c’est délicieux !), le tout arrosé de bonnes bières. Ça fait plaisir !!

La nuit est bénéfique, nous avons dormi comme des pierres, et n’avons même pas entendu les autres se lever, se préparer et partir pour le boulot et l’école. Impressionnant ! 

Aujourd’hui, nous allons visiter Gênes, mais avant, nous nous arrêtons à Pomdeter, là où travaille Emilio. C’est à la fois un café, un marché et une épicerie bio. Et tous les jours, des plats sont cuisinés pour le midi avec les légumes un peu vieux et non vendus du marché. On aime le concept, on y est bien, et l’ambiance semble être chouette. 

Nous voilà prêts pour partir à la découverte de la ville, malgré la pluie qui nous fait l’honneur de sa présence. On a de la chance, c’est pile le jour où on ne roule pas ! 

On se promène dans la vieille ville, remplie de ruelles très étroites et sombres, encadrées par des immeubles hauts. Comme on est lundi, de nombreuses boutiques sont fermées, et c’est presque un peu oppressant à notre goût ces ruelles. On longe ensuite la rue Garibaldi, où se trouvent de nombreux palaces, anciens vestiges du passé riche et commerçant de la ville. Certains sont un peu défraîchis, d’autres bien rénovés. Dès que les grandes portes sont ouvertes, on se faufile dans les hall d’entrée, à la découverte de cours, d’escaliers, d’ascenseurs… ça doit quand même être étrange de vivre là dedans ! 

On enchaîne avec une petite expo de photos au palais des Doges, et une montée à l’ascenseur panoramique. Oui il y a un ascenseur, entièrement de style art déco (on se croirait presque dans le métro parisien) juste pour voir le panorama au-dessus, qui doit être superbe par beau temps. Dans un resto populaire, nous goûtons aux lasagnes pesto, un vrai délice !! On s’arrête également dans une multitude de cafés, l’expresso, les chocolats chauds (du vrai chocolat fondu!) et surtout les cappuccino y sont excellents et pas chers !!

Nous retrouvons ensuite la famille d’Emilio pour la soirée. 

Le lendemain, après un 2e petit dej au café Pomdeter, nous quittons la ville de Gênes sous un ciel bien lourd.

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La plaine du Po : de Crémone à Caorso

Nous voilà requinqués pour les derniers km qui nous séparent de la ville de Crémone ! Nous retrouvons Giorgio sur la piazza del Duomo, la place centrale, où se trouve la cathédrale et son clocher en briques, le plus haut d’Europe ! L’ensemble est très bien mis en valeur par les éclairages, la vue est belle. 

Nous roulons ensemble jusqu’à sa maison, où nous retrouvons Anna sa femme, et Nina, Romeo, Martino et Emil ses enfants. La maison est pleine de vie, on s’y sent bien. Anna et Giorgio faisaient du cirque avant, ils avaient monté un spectacle tous les deux ! C’est par contre bien frustrant de ne pas parler italien et de ne pas pouvoir intégrer plus les enfants dans nos discussions. 

Le lendemain matin, nous déjeunons rapidement, plions nos affaires, et suivons Giorgio en ville. Il a contacté un de ses amis qui accepte de nous faire visiter rapidement son atelier : il est luthier 😁 Je suis aux anges ! En effet, Crémone est considérée comme le berceau du violon, et c’est ici que Stradivari et Guarneri avaient leur atelier. Aujourd’hui il y a encore une grande école de luthier dans la ville, et plus de 150 ateliers ! On complète notre passage dans la ville par la visite du musée du violon, très instructif mais quasiment tout en italien, et un peu amputé par le covid (pas de prestation live, pas d’audioguide,… Dommage). 

On suit ensuite Giorgio à son travail : il est éducateur dans une association qui aide à l’insertion des jeunes ado/adultes en difficulté, autour notamment d’un atelier de réparation de vélos. On y retrouve son collègue Enrico, tout aussi sympa. Le tout dans une ambiance décontractée, ça semble être super cet endroit ! 

Il nous faut ensuite quitter Crémone, mais la journée est déjà bien avancée. On est aussi peu motivé, alors on ne roule pas bien loin et on s’arrête à Caorso. Nous y avons repéré un grand terrain de foot derrière une église, ça nous semble pas mal. On commence à discuter avec les voisins, qui de fil en aiguille nous amènent à la porte du presbytère et sonnent pour demander au prêtre. 

Tout va très vite ensuite : le prêtre nous ouvre, et comme il parle français, congédie les voisins, car « nous n’avons pas besoin d’intermédiaire »! Voici Jean de Dieu, prêtre missionnaire originaire du Congo, qui nous invite chaleureusement à nous installer au stade, et à le rejoindre pour partager une bonne bouteille de vin. Quel accueil ! 

Nous passons la soirée à discuter, c’est très intéressant d’écouter Jean de Dieu parler de son pays, son village, les enfants soldats, mais aussi les anecdotes sur ses études de théologie et philosophie et le catéchisme qu’il enseigne.

Nous nous levons tôt le lendemain matin car nous avons rdv avec Jean de Dieu à 7h30 pour le petit déjeuner. Nous n’avons pas eu froid cette nuit, cela fait longtemps qu’on avait pas aussi bien dormi dans la tente ! 

À notre arrivée, le couvert est mis, les biscuits sont sur la table, ne reste plus qu’à faire le café. Trop sympa ! Nous discutons encore de longs instants avec Jean, avant de se remercier mutuellement (ça nous fait toujours bizarre quand on nous remercie d’être venu, alors que c’est nous qui avons reçu l’hospitalité !). Il nous offre une énorme brioche d’un kilo (panettone) pour la route 😍

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La plaine du Po : Venise à Crémone

Le lendemain, nous sommes contents de quitter Mestre et Venise. Nous roulons jusqu’à la ville de Padoue, le long de canaux, et sur des routes presque entièrement dédiées aux vélos. C’est chouette ! Par contre, sur les derniers kilomètres, un horrible vent de face se lève et nous ennuie bien fort.

Nous nous promenons ensuite dans la ville, et visitons le musée du pré-cinéma (cf. L’article de Mathieu sur le sujet !).

En fin de journée, nous retrouvons Filippo qui nous héberge ce soir, et que nous rencontrons grâce à warmshower. Nous apprenons qu’il est chercheur en physique quantique, Mathieu est content ! 

Nous parlons français ensemble, nous mangeons de bonnes pâtes à la sauce putanesca (tomates, olives, , câpres, ail, anchois), et nous ré-enfourchons nos montures pour aller nous promener dans le centre ville de nuit. On fait également une pause dans un petit bar avec de la musique live, avant de rentrer, on est bien fatigué !!

Le lendemain, Filippo nous a acheté des fitelles à la boulangerie. Ce sont des beignets fourrés à la crème et au sabayon, c’est une spécialité du coin, pour la période du Carnaval (voilà pourquoi on en avait trouvé plein à Venise !). On se régale, puis on quitte notre hôte qui a beaucoup de travail. 

Notre route longe à nouveau des canaux, elle a peu d’intérêt. Dans les villages, les clochers des églises sont souvent des tours séparées. L’une d’elle est vraiment très penchée et nous rappelle la tour de Pise ! C’est bien perturbant. 

On atteint la rivière Po en fin de journée et on s’arrête pour camper au bord d’une ferme, où les propriétaires nous ont autorisés à planter la tente. La nuit est fraîche !

Au matin, nous reprenons la plate route le long du Po, et filons en direction de Mantova. Elle a au moins l’avantage d’être cyclable cette route ! 

Nous retrouvons Francesco sur son vélo, et nous finissons le trajet ensemble. 28 ans, nombreux voyages à vélo à son actif, il nous accueille dans sa famille, où habitent ses parents, son frère, sa sœur et sa grand-mère. La maison est immense, nous avons une grande chambre pour nous, la possibilité de faire une lessive, c’est le luxe ! Nous avons aussi droit à un festin, accompagné d’un bon vin rouge et même d’un vin cuit pour le dessert, un crumble aux fruits rouges. Alalala on en est sorti repu !

Au réveil, le petit déjeuner est servi quand nous nous levons. On se régale, et au moment de partir, la mère de Francesco nous offre la fin du crumble d’hier et un énorme bout de parmesan 😍 On est touché et on lui assure que ça va relever nos éternelles pâtes à la sauce tomate ! Il n’y a plus qu’à investir dans une petite râpe !

Francesco nous emmène ensuite à la découverte de Mantova. Le centre est bondé, très vivant, c’est plaisant. Nous visitons également la basilique Saint André, qui est entièrement peinte à l’intérieur, avec des fresques énormes au plafond, et des trompe-l’œil saisissant sur toutes les colonnes. Waouh ! 

Nous prenons encore un petit café ensemble et puis vient l’heure de nous séparer. Pour nous, la direction est la ville de Crémone, où nous avons une famille qui va nous héberger. Décidément, warmshower marche du tonnerre de feu dans ce coin ! 

La route est semblable aux jours précédents, plate, le long de rivières canalisées, au travers de fermes plus ou moins odorantes. 

Lors d’une pause gourmande (glace et capuccino), nous rencontrons Manuela, la serveuse du café où on est arrêté. Elle ne cesse de s’enthousiasmer sur notre voyage, on dirait qu’elle nous prend vraiment pour des héros ! Lorsqu’on la quitte, elle nous offre deux sachets de bonbons et des Torrone, les nougats typiques de Crémone. Miam !

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Les lanternes Magiques🪄

Nous voyons sur le routard qu’un musée du pré-cinéma se trouve à Padoue. La curiosité nous dirige vers une grande porte, qui se dresse devant nous.

On sonne à l’interphone : la porte s’ouvre et on grimpe de grands escaliers jusqu’à arriver sous une magnifique charpente de bois. Là, dans cet espace sombre, un petit monde fascinant s’offre à nous. C’est le monde où ni la photo, ni l’animation qu’on connait sur les écrans n’existe encore, mais où on s’émerveille déjà de la lumière, de l’image, du voyage.

On découvre dans une grande pièce « les lanternes magiques », sorte d’instrument optique permettant de contempler le monde. Il s’agit de l’ancêtre du projecteur (lui-même ancêtre du video-projecteur…).

On allume la machine et on se retrouve projeté dans ce monde où l’optique, le objectifs ne sont encore que des curiosités. Nous sommes au début de la belle époque !

Ces lanternes sont plutôt simples de composition : une source lumineuse (bien souvent des bougies, ou de l’huile) permet la création d’un faisceau lumineux suffisamment puissant (ce qui crée beaucoup de fumée derrière le projecteur, et exige une cheminée !!). Ce faisceau traverse ensuite une plaque de verre peinte, et une lentille permet la projection de l’image sur un écran. A l’époque, la simple apparition de l’image était particulièrement magique et révolutionnaire. Certaines lanternes pouvaient projeter ainsi plusieurs images et possédaient deux objectifs ! Ceux ci permettaient un effet de fondu enchaîné et le changement d’image sans interruption de la projection. Magique à l’époque !

D’autres machines exposaient des plaques parfois peintes de telle sorte qu’on pouvait voir différents moments de la journée en fonction de l’éclairage qui leur était apporté.

De petits trous présents dans les plaques pouvaient être utilisés pour matérialiser les lampadaires des villes scintillantes. On découvrait ainsi le monde de jour comme de nuit ! Voyager ainsi était particulièrement tendance a l’époque, et les riches propriétaires pouvaient s’enorgueillir d’avoir un tel progrès dans leur salon !

Découvrez le monde avec la machine « El mundo novo » !

Le guide fait marcher quelques de ces machines devant nous, la poésie des images opère encore aujourd’hui ! Quelle révolution pour l’époque !

On retrouve également toute cette poésie dans le cinéma des ombres où derrière un écran et une source lumineuse, de petites maquettes s’activent pour conter quelques histoires ! Le théâtre du chat noir à Paris y est évoqué, et avec Mathilde ça nous rappelle un bon souvenir !

Le chat noir, théâtre des ombres très réputé pendant la belle époque !

Après l’apparition de la photo, les plaques de verre peintes sont peu à peu remplacées par des plaques photographiques sur lesquels le réel est figé. Certaines de ces machines utilisent déjà une représentation stéréoscopique et permettent de voir des images en 3 dimensions, quel progrès !

En pleine découverte des lois de l’optique et de la persistance rétinienne, l’heure est également au début de l’animation ! Les images défilent si vite qu’elles semblent s’animer dans le Zootrope qui tourne !

L’ère du pre-cinema est à son apogée ; plus tard, les frères Lumières créeront le premier projecteur de cinéma moderne.

On ressort de ce voyage temporel à la sortie du musée, comme après un beau voyage. Cette belle époque nous semble aujourd’hui presque poétique par la spontanéité et la simplicité technique, mais aussi pleine d’espoirs envers ce monde nouveau façonné par le progrès. C’est fascinant !

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Venise

Nous nous séparons de Mirjan et Sonja non sans les avoir bien remerciés, et roulons vers la frontière italienne, à moins de 10 km de là. Nous débouchons rapidement sur une ancienne voie ferrée, qui descend directement dans le centre ville de Trieste. Quelle approche agréable pour une si grosse ville !! Ici, nous allons tout de suite trouver un réparateur de vélo pour changer notre roulement de pédalier arrière : prestation très rapide et pas chère, on a eu de la chance !

Et puis, alors qu’on voulait s’installer et boire un petit café, nous nous heurtons pour la première fois aux restrictions covid et à l’application du pass sanitaire. Ici, il s’appelle le “green pass” (allez savoir pourquoi ils ont mis des termes anglais !), et si nous l’avons bien, nous n’avons en revanche pas le “super green pass”, qui nécessite l’injection du “booster” (ces termes sont à la fois drôles et blasant), soit la 3e dose… Nous voilà donc paria. Suite à un conseil obtenu en pharmacie, nous allons à l’hôpital central de Trieste, mais on nous y refuse le vaccin, car dans cette région, on ne vaccine pas les étrangers. Sympa l’UE ! 

Bon, on arrive quand même à manger une pizza, car on nous a indiqué un resto où ils ne sont pas très regardant. Sinon, le reste du temps, nous ne sommes acceptés dans aucun resto, bar, café, hôtel, camping, transport en commun… 

On se promène rapidement dans le centre ville avant de décamper, histoire de se trouver un coin un peu tranquille pour planter notre tente ! Nous traversons le village de Monfalcone, qui nous fait bien sûr penser à Montfaucon en Velay !

Quand nous sommes enfin dans la campagne, nous nous arrêtons devant une ferme pour demander si nous pouvons planter notre tente dans leur pré. Une dame nous ouvre, ne parle aucune autre langue que l’italien, alors on se débrouille pour se faire comprendre. Elle nous dit qu’elle doit appeler sa fille pour voir ce qu’elle en pense. Et si le ton de leur conversation téléphonique est très enjouée (va bene va bene, si si…), elle raccroche et nous dit : ma fille a dit non.

Après ce bel échec, nous roulons seulement quelques centaines de mètres, trouvons une autre ferme qui semble abandonnée, et nous y installons sans rien demander à personne.

La nuit passe au gré de petits bruits de rongeurs et d’oiseaux. Mais soulagement au réveil, aucune de nos sacoches n’a été grignotée. Nous avons une grosse journée devant nous, et prenons la route sans tarder. Nous roulons 110 km sur du plat, un peu monotone, mais dans l’idée d’arriver vers Trévise, où un hôte Warmshower nous attend. 

Peu avant notre arrivée, on fait un détour par un Décathlon, le premier depuis longtemps ! Il nous faut racheter un oreiller, le notre étant percé. On y arrive sur les rotules, et en pleine hypoglycémie. Miraculeusement, un stand de Fritelle, des gros beignets frits bien gras et sucrés nous attend devant le magasin. Nos tremblements cessent rapidement et notre moral remonte en flèche une fois cette débauche de sucre, de graisse et de nutella est engloutie. Ça va mieux !

Encore une petite dizaine de kilomètres et nous arrivons enfin chez notre warlshower du jour. Il s’agit d’un camping dans une ferme agrotouristique, qui accueille gratuitement les cyclistes. Le cadre est bien beau, on peut mettre la tente au milieu du verger, il y a une douche chaude et des tables de picnic sous un abri en bois. Par contre, comme on est en hiver, on est tout seul, et ce n’est pas tout à fait l’expérience typique de warmshower : après nous avoir montré les sanitaires, notre hôte (dont on ne se rappelle même plus le nom) rentre chez lui, on ne le reverra pas de la soirée. Il nous a même donné le code du portail pour qu’on puisse partir quand on veut le lendemain matin. On va pas se le cacher, on est un peu déçu. Mais en même temps, le principe de base du réseau warmshower, c’est bien juste d’offrir une douche chaude ! Disons qu’on a été mal habitués par toutes nos précédentes expériences.

Au réveil le lendemain matin, il fait bien bien froid, notre tente et Steven sont complètement givrés ! Nous attendons les premiers rayons de soleil avec impatience et observons nos affaires goutter.

Nous reprenons la route, traversons Trévise et roulons jusqu’à Mestre, la ville qui fait face à Venise. Au hasard d’une route, nous tombons sur un vaccinodrome. Aubaine ? On décide de tenter notre chance, et bien nous en prend, car on nous accepte directement, et nous obtenons notre précieux sésame ! Enfin… du moins, un papier attestant qu’on a eu notre 3e dose, mais il nous manque quand même le QR code. Et dans les prochains jours, on va tomber sur des resto qui ne démordront pas et ne nous accepteront pas, car nous n’avons pas de QR code à leur présenter 🤬🤬🤬

Après ça, nous atteignons enfin l’immense pont qui mène à Venise, et au bout, les nombreux parkings. Au milieu, un espace pour les vélos. C’est plutôt high tech, ce sont carrément des boxs où on enferme totalement son vélo. Ça coûte 10€ la journée, et il est  bien écrit que si un vélo s’avérait mal garé, il pourrait être enlevé par la police. Bien sûr, ce système ne marche pas pour notre tandem qui est bien trop long pour entrer dans ces boxs… Nous l’attachons donc à un poteau, ne payons pas et partons explorer la ville en misant sur le bon sens du personnel.

La météo est avec nous, il fait un temps radieux et ça fait ressortir les couleurs des bâtiments autour de nous. Il y a peu de monde dans les rues, ce qui surprend Mathieu par rapport à la visite qu’il avait déjà faite ici il y a quelques années. Parfois, on débouche sur de petites places, qui laissent presque deviner une vie de quartier : des enfants qui jouent au ballon, des vieux assis sur un banc et qui discutent… Tout au long de la journée, nous croisons de belles boulangeries et nous régalons avec les petits beignets traditionnels de la période du carnaval.

Nous arrivons sur la place Saint Marco et sommes éblouis par la beauté des bâtiments et leurs couleurs orangées par le soleil qui commence à décliner. De même, juste derrière le palais des loges, lorsqu’on débouche sur la lagune. Seule ombre au tableau ? Un énorme goéland qui a fondu sur mon goûter et est reparti avec !!!

Le soir, nous sommes hébergés à Mestre par Shira, grâce au réseau Bewelcome. Américaine, elle a été avocate et prof, et elle est maintenant en Europe pour faire un master en lien avec l’accueil des migrants. Dans un premier temps, la formation était à Montpellier, puis ici en Italie, et elle va ensuite partir en Tunisie, notamment pour apprendre l’arabe. Nous passons une super soirée en sa compagnie, autour d’un bon risotto (elle nous assure que oui, les crevettes peuvent se manger toutes entières, la tête y compris !).

La nuit en revanche est moins sympa, avec une bonne fièvre pour ma part suite au vaccin.

Le lendemain matin, nous passons encore un moment agréable avec Shira. Quelle belle rencontre ! Nous décidons de retourner pour la journée à Venise, vu qu’on a bien aimé hier. Malheureusement, le temps est beaucoup moins beau qu’hier, les couleurs sont fades, il y a beaucoup plus de monde (on ne se l’explique pas trop), et on est crevés par le vaccin !! Bref, disons qu’on aurait été frustrés de ne pas être revenus, mais on a été déçus de notre 2e visite.

On a quand même pu en profiter pour se faufiler dans la basilique Saint Marco, pendant la messe, pour apercevoir furtivement les belles mosaïques qui recouvrent ses coupoles.